Abbaye du Thoronet
L'abbaye, enchâssée dans l'écrin des chênes et des pins d'Alep n'est visible aux yeux des visiteurs qu'à l'arrivée qui paraît improbable Seuls les panneaux visibles tardivement, nous indiquent que nous sommes sur le bon chemin .
Notre visite guidée prévue pour 30 personnes fut en réalité donnée à un plus grand nombre, mais cet inconvénient fut vite oublié grâce aux connaissances et à la maîtrise de notre guide.
«De la naissance de l'ordre Cistercien en 1098 par Robert de Molesmes à la fondation de l'abbaye dont la famille de Castellane est l'initiatrice en 1136, en passant par l'installation
des moines vers 1157, notre guide a évoqué le contexte politique, économique de l'époque et les raisons probables des transferts des lieux culte.
Alors qu'au XIIème siècle les dons et donations ne tarissent pas et permettent à l'ordre d'augmenter ses biens fonciers, la communauté composée de 25 moines, aidée des frères convers et d'ouvriers extérieurs est à l'origine de la conceptualisation et matérialisation de l'ouvrage qui s'est échelonné entre 1150 et 1250. Malheureusement, à la fin du XIIIème siècle les donations s'amenuisent, puis la grande peste au XIVème siècle et l'insécurité générée par les hordes de pillards appauvrissent l'abbaye qui perd ses convers . C'est alors le début du déclin de l'abbaye.
Le rattachement de la Provence à la France en 1481, profite un temps à l'abbaye avant que celle ci ne subisse les conséquences des guerres de religion entre 1562 et la fin du siècle où elle sera pillée. Et à la révolution, elle souffrira de la vindicte paysanne jusqu'à ce qu'elle devienne propriété de l'Etat.
Les véritables travaux de restauration de cette abbaye malmenée, ne débuteront qu'en 1870.
Depuis les années 1980, plusieurs chantiers très coûteux ont été entrepris pour le sauvetage de l'abbaye et la consolidation des fondations et maçonneries.
Dorénavant, des activités culturelles et artistiques sont accueillies dans l'abbaye ... L'acoustique particulière et probablement unique de celle-ci favorise les concerts de musique médiévale .Notre guide nous en a donné un exemple en entonnant un chant grégorien dont la sonorité nous a laissés sous le charme.
L'austère beauté qui illustre à merveille la règle cistercienne, rappelle ses « soeurs» Silvacane et Sénanque: le chevet de l'abbatiale est un élément architectural semblable à cette dernière...L'ampleur de la nef largement ouverte sur les collatéraux étonne le visiteur non préparé par les volumes extérieurs plus modestes. Seuls éléments figuratifs visibles sur les chapiteaux: des petites croix .. La douce lumière diffusée par les trois baies joue admirablement avec les teintes blanches, roses et rouges, grises, azurées ou miel de la pierre calcaire du Thoronet. Nous avons visité l'abbaye le matin, cet espace est tourné vers l'orient et le soleil levant, symbole de résurrection.
Le cloître, cœur du monastère, est l'un des plus anciens de l'ordre cistercien. Son architecture parfaitement rythmée révèle la sobriété des lieux: voûtes en berceau, baies géminées mais sans décor ou avec de rares ornements (chapiteaux ornés de feuilles de roseau ). Il favorise la lecture statique ou dynamique … malgré sa déclivité et les marches dues au dénivelé du terrain .
Le cloître ouvre sur l'armarium qui servait de bibliothèque mais aussi sur la salle capitulaire où nous avons pris place sur le rocher qui accueillait la communauté des moines dans le passé, assis sur des gradins de bois posés dans cette pierre taillée . Les frères entouraient le père abbé et nous entourions notre guide qui nous montrait les chapiteaux, ornés de feuilles d'eau, la main et la crosse abbatiale, les épis de blé, pommes de pin, fleurs … et spécifiait que les voûtes d'ogives couvraient traditionnellement la salle capitulaire d'une abbaye cistercienne et que chaque clé de voûte est ornée d'une rosace à six pétales .
Nous avons ensuite traversé le dortoir mais n'avons pu voir la salle des moines , le chauffoir, la cuisine et le réfectoire disparus ainsi que toutes les structures situées au Nord .
Un seul regret, celui d'avoir dû s'arracher à la quiétude du lieu pour rejoindre rapidement la civilisation contemporaine afin d'honorer nos autres rendez-vous .